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Origine1975
27 juillet 2020

Tome 8 : chapitre 50

Chapitre 50

       Michio se réveilla en sursaut. Il se redressa aussitôt pour regarder autour de lui avec appréhension. Il se trouvait dans une chambre d’hôpital, au mur aussi déprimant que son mental actuellement. Il laissa retomber sa tête sur l’oreiller et porta son bras sur ses yeux pour camoufler la luminosité de la pièce, en soupirant. 

 

       Samedi soir, il avait passé pratiquement toute la nuit à discuter avec son frère de ce fameux mécanicien Aden. C’était tellement différent la manière dont son frère parlait de cet homme par rapport à Dan auparavant. Il avait certes toujours ce maudit retrait, cette peur tétanisant, hérité de son arrière-grand-père August, l’empêchant d’avancer dans les relations amoureuses, mais en même temps, ce n’était pas pareil. 

 

Une timidité inconnue venait d’apparaitre. Déjà du fait que Naël avait été surpris d’avoir réagir à la présence de Rafaël l’avait énormément secoué, surtout la peur que son frère lui en veuille. Mais en réalité, cette réaction l’avait, juste, débloqué sentimentalement et ce n’était pas rien. Maintenant, Naël ne savait plus où il en était face à cet Aden. Comment devait-il agir en face de cet homme de neuf, dix ans de plus que lui ? 

 

Michio avait passé ensuite tout le reste de la journée du dimanche avec ces parents, profitant d’eux au maximum. Ils en avaient eu besoin, tous. Erwan et Luce avaient accepté la roulette russe de leur fils, car ils n’avaient pas eu vraiment le choix, mais la peur serait présente jusqu’au bout. 

 

Le garçon fit son possible pour leur faire oublier son absence pendant plusieurs jours comme il put et à sa manière évidemment. C’est-à-dire en ennuyant son père Luce en changeant des passages dans son histoire. Il se fit d’ailleurs courser dans toute la maison avant d’être coincé dans la salle de musique où il dut subir une attaque de chatouilles comme quand il était gosse. 

 

Il resta également une heure au téléphone avec son pirate. Celui-ci rendait visite à Léo Amory avec Ludwig. Ludwig avait songé que ce serait bien si Rafaël apprenait autre chose que la mécanique. Étant donné le travail assez physique de Léo dans le bâtiment, ce serait peut-être idéal pour faire changer les idées au garçon. 

 

Pour rendre jaloux son pirate, Michio avoua avoir craqué pour Léo à une période, surement parce que l’homme était roux également. Rafaël bouda sous le rire de son diablotin. Carlin admirait son petit-fils. Celui-ci cachait tellement bien son mal être. Il se demandait si lui-même avait eu ce même talent par le passé. En tout cas, Michio parvint à donner le change jusqu’au lendemain, jusqu’à sa venue dans cette chambre. 

 

Il avait quand même pu s’endormir sans problème, car les deux âmes tourmentées semblaient dormir sereinement pour le moment. Mais, les démons du sommeil finiraient par revenir en force. Michio soupira. Il finit par se lever pour se rendre dans la salle de bain attenante. Il prit une douche rapide, s’habilla d’un simple pyjama avant de regagner la chambre d’un blanc immaculé. 

 

Michio soupira en regardant autour de lui, morose. Tous ces murs blancs étaient d’une tristesse monotone. Le blanc était pour être mis en couleur, pour faire apparaitre des formes, des visages ou un simple coucher de soleil. Soupirant à nouveau, il se laissa tomber sur le fauteuil dans un coin pour regarder par la fenêtre. 

 

La vue était quand même bien meilleure puisqu’il était presque au dernier étage de l’hôpital et dominait ainsi pratiquement toute la ville. Mais, en la voyant, elle donnait envie de peindre. C’était horrible cette sensation. Il n’avait jamais eu ce sentiment auparavant puisqu’il pouvait dessiner partout. Il s’avachit sur le fauteuil fixant le plafond. 

 

La porte finit par s’ouvrir livrant le passage à un jeune chinois portant un plateau où la bonne odeur du chocolat chaud parvint aux narines de Michio. Celui-ci se redressa rapidement pour observer l’infirmier. Il l’avait croisé au début dans le bureau d’Ashula. Il lui avait donné une impression de prestance et d’intimidation. Et même maintenant, il l’intimidait toujours autant. Tout le monde parlait des yeux de son grand-père et des siens comme énigmatiques et effrayants, mais Michio devait bien reconnaitre que ceux de Jian Bào l’étaient tout autant voire pire. 

 

Le jeune chinois déposa le plateau sur la table et l’amena jusqu’au garçon en silence au début. Ensuite, il s’installa sur le lit, attendant. Michio ne se fit pas attendre. Il dégusta son petit déjeuner comme un affamé sous le sourire amusé de l’infirmier. 

 

Quand il eut terminé, Jian déposa alors une pile de carnets de tailles moyennes et des crayons avec un sourire de connivence. Il pencha la tête tout en observant le regard noir de son patient s’illuminer. 

 

— À l’origine, tu ne devrais pas avoir de distraction. Ashula affirme n’en avoir pas eu pour lui-même. Mais, je pense que tu en auras besoin pour te détendre et éviter de t’ennuyer trop surtout. 

 

       Les deux hommes gardèrent le silence un moment avant que Jian ne reprenne la parole en posant une main sur les carnets. 

 

— La plupart des carnets seront brûlés à ta sortie, Michio. Je préfère que tu le saches.

 

       Michio baissa les yeux sur ces doigts crispés. 

 

— Je le sais. 

 

Il esquissa un petit sourire, un peu triste. 

 

— Je le comprends. Je risque de dessiner des horreurs sans nom. Il vaut mieux que ça ne tombe dans les mains de n’importe qui. Ça me fera mal, mais c’est un mal pour un bien. 

 

       Jian hocha la tête, soulagé. 

 

— Jian ? Pourquoi m’aides-tu ? 

 

       Le jeune chinois haussa les épaules avant de poser les mains sur le lit vers l’arrière et de lever les yeux vers le plafond. 

 

— J’ai hérité d’un don par ma mère. Il ne fonctionne pas toujours, mais on peut dire qu’il m’a causé beaucoup de tracas depuis que je suis petit. Il est même responsable de la mort de mère. Pour faire court, une secte pense que je suis la réincarnation de leur Dieu de la vérité et depuis, elle m’enlève de temps à autre. 

 

       Jian laissa échapper un rire jaune et amer. 

 

— À cause d’eux, ma famille a les mains pleines de sang. Mon don commence à perdre en intensité et cela me soulage. Mais, j’aimerais bien détruire ce groupuscule avant sa disparition totale afin de venger tous ces morts commis à cause d’eux. Je maudis mon don pour beaucoup de choses, mais il m’a aussi beaucoup aidé également. Et il m’a permis par exemple de savoir que ton propre don pourrait te détruire. 

 

       Le chinois se redressa pour observer le plus jeune. 

 

— Ça ne semble pas rationnel, n’est-ce pas ? Khasan n’y croit pas. Il a eu toutes les preuves devant lui, mais il ne veut pas y croire. 

 

— Khasan ? Qui est-ce ? 

 

— Mon compagnon. Tu as peut-être dû le croiser. Il a la manie de toucher les fesses.

 

— Ah ? Ce bel homme ? Eh bien, il est canon. Dans les relations de ma famille, nous connaissons aussi une personne qui a cette manie. Est-il malade pour être souvent dans les parages ?

 

       Jian secoua la tête, tout en esquissant un sourire. Il aimait parler de son homme. 

 

— Malade ? Lui ? Non, il est en très grande forme. Son petit frère fait partie de cet étage. 

 

       Michio se tourna légèrement vers l’arrière avant de regarder à nouveau Jian. 

 

— C’est le jeune homme dans le coma. Il se nomme Kirill. Il a été drogué avec une dose pas très bonne. Le médecin a réussi à le stabiliser, mais depuis il est dans le coma avec des cauchemars sans fin. De l’autre côté, c’est une petite fille de dix ans. Elle a souvent été abandonnée. Elle a été chopée violemment par une voiture. Le docteur Ashula a fait son possible pour la maintenir en vie et franchement, je lui tire mon chapeau. Mais, elle doit subir encore des opérations, mais son mental est au plus bas. Elle ne semble pas vouloir survivre. Peut-être se sent-elle seule ? Peut-être se sent-elle indésirable ? En tout cas, tant que son mental ne remonte pas, le docteur Ashula ne pourra pas continuer les opérations. 

 

       Michio écouta Jian dans un silence total. Il ne voulait pas perdre une seule miette de renseignements. Il sentit une immense tristesse pour cette petite. Il leva les yeux vers le plafond à nouveau. Une idée germait dans son crâne. Est-ce réalisable ? Pour cela, il devait simplement le demander. Alors, il prit une grande inspiration. 

 

— Jian ? Mon père Luce a décidé de squatter cet hôpital tant que j’y serais. L’accord lui a été accordé. Mais, il ne peut pas vraiment me voir, sauf de loin. 

 

       Michio posa à nouveau son regard sur le jeune chinois. Il le voyait sourire comme s’il savait d’avance ce qu’il allait lui demander. Le garçon en fut soulagé. 

 

— Pourrais-tu faire en sorte que mon père aille voir la petite fille ? Je suis sûr qu’il ne restera pas de marbre en la voyant. Elle sentira peut-être la présence de mon père. Ça lui fera peut-être du bien et cela m’aidera également, dans un sens. 

 

— Génial ! Dès que j’ai vu ton père, je me suis dit que c’était lui pour Aiya. J’avais déjà prévu de les mettre en relation tous les deux, mais si en plus, j’ai la permission de son propre fils, c’est encore mieux.

 

       Michio regarda le jeune chinois un instant interloquer avant de s’esclaffer de rire. Ce chinois était bien étrange, mais il l’appréciait bien, même plus que bien. Jian se leva d’un coup et vint lui ébouriffer les cheveux. 

 

— Faut que j’y aille, mais, je reviendrais régulièrement voire si tout va bien. Je te ramènerai d’autres carnets et crayons. Ils vont bientôt se réveiller. Nous avions fait en sorte de bien les endormir pour te laisser t’installer tranquillement. Ah oui, il y a deux autres infirmiers. Il y a Luis, un jeune brun de mon âge et Driss, un beau mâle avec de belles fesses. Tu risques de les voir également donc ne soit pas surpris si ce n’est pas moi. 

 

       Le jeune chinois se dirigea vers la sortie. À peine sortit-il qu’il soupira, il espérait sincèrement ne pas s’être trompé. Il ne voulait pas être responsable de la perte de ce jeune garçon. Il se gratta la tête avant de reprendre son chemin vers les ascenseurs. Il sentit venir avant même que la main n’aille se poser directement sur sa fesse. 

 

       Il s’arrêta net et se pencha vers l’arrière où apparaissait un homme grand, brun et aux magnifiques yeux métalliques dont des reflets bleus apparaissaient parfaits. Jian se troubla quand son regard s’attarda sur la légère cicatrice sous l’œil gauche. Il se souvenait comme si c’était hier l’accident ayant été responsable de cette blessure. L’homme affichait un sourire charmeur.

 

— Parfaitement adapté à ma main, murmura-t-il.

 

       Il se pencha pour déposer ses lèvres sur celle du jeune chinois. Celui-ci répondit avec délectation au baiser. Il n’arrivait pas encore à se réjouir d’avoir enfin son russe auprès de lui. Il savait la raison. Les dix ans n’étaient pas encore passés. Il le serait dans quelques jours seulement. 

 

— Eh ma petite couleuvre ? Est-ce que cela te dirait de prendre quelques jours pour ton anniversaire ? 

 

       Se fichant du protocole de l’hôpital puisque de toute façon seules les personnes autorisées n’avaient le droit de passer par cet étage, Jian put sans problème se mouler contre son homme. Celui-ci lui entoura la taille. Maintenant que son petit chinois était enfin dans sa vie, il aimait le prendre dans ces bras afin de le sentir contre lui. Même dix ans auparavant, il affirmait que le garçon s’emboitait parfaitement à son corps et il pouvait dire maintenant que cela n’avait pas changé. 

 

— Cela peut se faire. Driss et Luis peuvent s’occuper des tâches pendant un temps seul. Je leur rendrais la pareille. Pourquoi ? 

 

       Faisant glisser une main dans le dos faisant frissonner tout le corps du chinois, Khasan sourit encore plus. Il se mit ensuite à lui caresser la joue d’un doigt faisant noircir les yeux noirs encore plus. Il s’en rendait compte d’avoir un pouvoir immense sur le jeune homme. Il l’avait aussi remarqué dans le passé. À l’époque, il en avait été paniqué de peur de faire le moindre mal à ce garçon désiré, mais ne pouvant l’avoir. La peur de le briser l’avait longtemps tenaillé et empêché de dormir. 

 

— J’ai juste envie de m’évader seul avec toi, avoua-t-il légèrement honteux, détournant les yeux. 

 

       Jian regarda son homme les yeux brillants. Il lui posa ses mains sur chaque joue et le força à le regarder. Il approcha ses lèvres des siennes. Il lui chuchota avant de l’embrasser avec fougue. 

 

— Moi aussi, je le veux. 

 

       Michio referma la porte laissant le jeune couple entre eux. Il sourit. La porte avait juste été mal fermée. Il n’avait pas voulu observer, mais le couple était tout simplement envoutant. Il s’étira une envie subite de dessiner. Alors, il se jeta sur le lit, prenant un des carnets et se mit en devoir de dessiner le jeune couple aperçu dans le couloir. Il l’offrira à Jian quand il le reverra. Ce sera son cadeau de remerciement.

 

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       La moto s’arrêta devant la maison. L’homme resta un long moment devant avant de stopper le moteur et de retirer le casque. Ne faisait-il pas une erreur ? Il soupira. Ce n’était pas dans ces habitudes. Qu’est-ce qu’il avait en ce moment ? Fourrageant dans ces cheveux, il descendit de sa moto et avant de changer d’avis, il se rendit à la porte où il frappa avant d’entrer sans attendre.

 

— Bordel, Zoran ! Tu ne peux pas attendre qu’on vienne t’ouvrir.

 

— Ta gueule, Ilies ! Purée, mais plus tu vieillis et plus tu deviens vieux jeu.

 

— Désolé, je ne peux pas rester éternellement un enfant retardé. 

 

       Zoran observa l’homme brun, à la peau un peu brune, appuyé contre le portant de la porte de la cuisine. Il secoua la tête. Son ami se prenait trop la tête. 

 

— Tu devrais prendre des vacances, Ilies. Ça te ferait un bien fou. 

 

       L’homme détourna les yeux. 

 

— Je ne peux pas. Je dois m’occuper des garçons.

 

       S’approchant de son ami, il lui donna une pichenette sur le front le faisant grimacer. Ilies lança un regard noir à Zoran, tout en frottant son front. 

 

— Ils sont grands tes gosses. Ils ont un âge assez responsable. Et puis, tu sais très bien que Borghèse te fera remplacer le temps de tes vacances. D’ailleurs, il parait que le docteur Daniels est en vacances dans le sud. Ne me dis pas qu’il ne t’a pas demandé de l’accompagner ? 

 

       Ilies baissa son regard vers ses mains. Soan le lui avait gentiment demandé. Mais, Ilies hésitait. Il ne voulait pas que les garçons lui en veuillent de les laisser en plan. Zoran sourit amuser de voir toutes les émotions passées sur le visage de son ami. Des pas dans les escaliers lui firent tourner la tête vers l’endroit. Il croisa alors les yeux vert clair d’un certain flemmard. Il se troubla plus que de raison. 

 

— Ça tombe bien. Je suis venu pour t’embarquer, Nathan. 

 

— Hein ? Et pourquoi ? Hors de question que je sorte, j’ai trop la flemme. 

 

       Le regard brun de Zoran se noircit d’un coup. Voyant un sourire satisfait apparaitre sur le visage du jeune homme, Zoran marmonna des imprécations peu catholiques en l’encontre de Nathan, mais d’un mouvement souple, il parvient juste devant lui. Il lui attrapa la main et le força à descendre. 

 

— Hé ! j’ai dit que je ne voulais pas. Vous êtes sourd ou quoi ? 

 

— Ilies ? Je t’embarque ce flemmard de pacotille. Par contre, je ne sais pas si je te le ramènerais en un seul morceau.

 

       Toujours sans lâcher le garçon, il sortit rapidement de la maison tout en ayant le réflexe d’attraper une veste pour Nathan. Arrivé devant sa moto, il lui jeta la veste. 

 

— Pff ! C’est la veste de Rolan, ça ! Vous êtes nul. 

 

       Nathan pouvait grailler, mais pour une raison inconnue, il était quand même ravi de revoir l’homme. Il squattait un peu trop ses pensées, ces derniers temps. C’en était perturbant.

 

— Tu feras avec. Vous êtes de la même taille de toute façon. 

 

       Reniflant sans répondre, Nathan mit la veste en question, lui allant parfaitement. Il baissait la tête. Il tentait d’éviter de regarder Zoran pour éviter d’être à nouveau troubler. 

 

— J’n’ai pas envie de me balader, moi !

 

— Écoute, mon chou. C’est soit tu m’accompagnes, soit je viens te lever demain pour faire un jogging à six heures du matin. Choisis ? 

 

       Nathan ouvrit la bouche en grand pour rétorquer, tout en levant les yeux vers l’homme. Il resta un instant sans répondre dès qu’il croisa le regard marron. Merde ! Le trouble le prit par surprise. Il inspira un bon coup. 

 

— Vous êtes une plaie vivante, vous savez ? 

 

       Zora sourit, amusée tout en lui tendant un casque. 

 

— Si tu savais comme je peux être pire que chieux. Tu veux bien me tutoyer à nouveau. Tu serais mignon. 

 

       Nathan eut un sourire en coin. 

 

– Pas envie. Vous savez à quel point j’aime bien vous faire chier comme vous le faites avec moi. 

 

       Zoran observa en silence le jeune homme. Il était exaspérant, mais pourquoi ressentait-il une attirance pour lui alors que ce n’était pas son genre habituel ? Était-ce parce que le garçon lui parlait toujours en face, sans peur ? Il n’en savait encore rien. La veille, il avait croisé son frère Sven, il l’avait vu songeur et le regard plus lumineux qu’auparavant. Il semblait qu’il avait eu la bonne idée d’avoir pris ces billets sur un coup de tête. 

 

— Comment était Daegan, Nathan ? 

 

       Le jeune homme fronça les sourcils, surpris avant de sourire. 

 

— Sur un petit nuage. Sa sortie avec ton frère l’a totalement mis sur un petit nuage. Même Rolan et sa mauvaise humeur n’ont pas réussi à lui ternir son dimanche. 

 

— Je vois. Tant mieux. 

 

       Il jeta un coup d’œil à la maison. 

 

— Léon devrait agir avec ton ami. Ce serait bien. Bon actuellement, il est un peu surbooké. Borghèse demande beaucoup de travail à Léon, mais ne t’inquiète pas pour ton ami. Il se chargera de le remettre sur les rails. 

 

— Qu’est-ce qui te fait penser que Léon pourrait faire quelque chose pour Rolan ? 

 

— N’est-ce pas évident ? Il faut être aveugle pour ne pas les voir se tourner autour ces deux-là. Aller grimpe !

 

       Nathan hésita encore un instant avant de prendre place à l’arrière du véhicule et recommença en ne sachant pas où mettre ses mains. Mais, dès que Zoran se mit en route, Nathan s’accrocha direct à sa taille. Il posa même légèrement son front contre le dos en fermant les yeux. Il pouvait, n’est-ce pas ? 

 

       Zoran aimait la vitesse. Il se fichait royalement de se faire arrêter pour x raisons, mais là, il fit attention. Il n’était pas seul. Il se devait d’être prudent. Il ne voulait pas être responsable d’un accident avec le jeune homme derrière lui. Il s’en voudrait énormément s’il arrivait quelque chose à ce petit flemmard. 

 

       Nathan appréciait cette promenade. Il n’était jamais monté sur une moto. Il espérait renouveler cette expérience, mais en même temps, il savait qu’il n’oserait jamais demander. Par contre, son humeur changea quand il reconnut l’endroit où Zoran l’emmenait. Pourquoi lui rappelait son passé ? Nathan se redressa pour regarder autour de lui. La ville basse, la ville poubelle, c’est ainsi que les clochards la surnommaient. Nathan fut quand même surpris de voir des maisons retapées. Cela ne faisait que quelques moins qu’il eût quitté ce coin. Le changement était déjà surprenant. Qu’est-ce qui était arrivé ? 

 

       Évidemment plus ils s’enfoncèrent dans la ville basse et plus Nathan reconnaissait son quartier, mais il se sentait perturber tout de même. Tout le monde dans ce lieu affirmait que tout le monde n’en avait rien à faire d’eux. Pourquoi ce changement de vision d’un coup ? 

 

       Zoran ralentit arrivant devant un grand espace où nombre de détritus s’accumulaient et où une caravane ayant vu de meilleurs jours se trouvait dans un coin comme abandonné. Nathan sentit son cœur battre la chamade en la revoyant. Il y avait vécu tellement d’années, le plus souvent cachées. 

 

       Quand la moto s’arrêta à quel pas, Nathan remarqua alors le rubalise noir et jaune de la police autour de la caravane. Que s’était-il donc passé ? L’avait-on installé au moment de son départ ? Il n’en avait pas souvenir pourtant. 

 

       Zoran détacha son casque et le retira. Il maintenait la moto avec une de ses jambes posées sur le sol. Nathan retira son casque également et descendit. Il regarda autour. Il se rendait bien compte de l’absence habituelle des clochards. Au centre de cette place, il y avait toujours eu un feu. Il n’y était plus enfin il y restait juste des cendres. Pourquoi ? Où étaient-ils tous ? Il se tourna d’un coup vers Zoran, perturbé.

 

— Où sont-ils ? Que s’est-il passé après mon départ, Zoran ? 

 

       Le jeune homme observa en silence le regard tourmenté du garçon. Avait-il eu raison de le ramener ici ? Il n’en savait rien. Borghèse lui avait donné l’ordre de le faire. Il n’avait jamais discuté les ordres de son chef, mais aurait-il dû ? Zoran secoua la tête. Non, l’italien ne s’était jamais trompé. Pourquoi le serait-il maintenant ? 

 

— Ils ont juste changé d’endroit. Tes anciens amis ne se sentent plus en sécurité près de cette caravane. Quand ils ont appris que tu te trouvais en lieu sûr avec l’assurance d’une vie meilleure, ils ont tous été ravis de l’apprendre. Tu avais de bons amis, Nathan. 

 

       Le garçon haussa les épaules, intimidé d’un coup. Il soupira. 

 

— Ils m’ont tous protégé à leur façon afin que je ne sois pas en danger, que je ne me fasse pas agresser comme la plupart des jeunes ici. J’ai grandi dans cette misère. Je ne sais pas qui sont mes parents. J’ai toujours vécu avec cette prostituée. Ce n’est pas ma mère, mais elle me nourrissait. 

 

       Nathan leva les yeux au ciel. 

 

— D’après ces dires quand elle avait encore une pensée cohérente, elle m’aurait trouvé sur un parking abandonné. T’imagines un peu ? Mes parents m’ont simplement abandonné comme un chien sur un parking. C’est d’un triste, non ? 

 

       Zoran s’appuya contre la moto et croisa les bras. Il observait son jeune compagnon. Nathan semblait avoir ouvert la vanne en revoyant son passé devant lui. 

 

— Tu n’en sembles pas traumatiser pour autant.

 

– Non. Je m’en fiche. Je me fichais de tout en fait. J’avais l’impression que rien ne me touchait. Je ne sais même pas comment se nomme cette prostituée. Elle m’a installée ici et elle venait de temps à autre pour m’apporter à manger, mais ensuite elle disparaissait. Un jour, elle n’est plus revenue. 

 

       Nathan serra ses bras autour de lui, perdu dans ces souvenirs. 

 

— Je suis resté enfermer pendant des jours à l’intérieur. J’avais trop peur de sortir, mais la faim a fini par me faire sortir. C’est là que j’ai rencontré ces clochards. Ils étaient tous là, réunis autour du feu. Ils avaient déjà peu de nourriture pour eux et pourtant, ils m’en ont offert. Ils ne m’ont jamais demandé ce que je faisais là. Petit à petit, en vieillissant, j’ai tenté au mieux de les aider, mais je ne sais pas pourquoi, mais un sentiment d’insécurité m’envahissait toujours quand je m’éloignais trop de la caravane. 

 

— Nathan ? Un jeune homme de ton âge a été retrouvé mort dans cette caravane. Il s’était enfui de chez lui et il y avait trouvé refuge. Un des clochards a prévenu la police comme quoi une voiture noire bien trop reluisante pour le quartier venait de s’arrêter. Il n’a pas pu décrire les hommes, mais il a bien vu les armes. Nous sommes arrivés trop tard. Le jeune garçon avait déjà été abattu. 

 

       Nathan jeta un regard horrifié à la caravane, avant de sentir des larmes coulées le long de ces jours. 

 

— Je vous avais dit que je ne devais pas quitter cette caravane. Vous ne m’avez pas écouté et c’est un autre qui est mort à ma place.

 

       Zoran attrapa le bras du jeune homme et le retourna d’un coup vers lui. Il le chavira dans ses bras. Nathan tenta de s’éloigner, mais la poigne était trop forte pour lui. Il se laissa aller en posant finalement sa tête contre l’épaule solide de Zoran, une main sur le torse. 

 

— Qu’avait-il dans cette caravane, Nathan ? 

 

       La main de Nathan se crispa contre la veste de cuir de son camarade. 

 

— Je ne sais pas trop, mais elle disait toujours : quoiqu’il se passe, mon Nat ne laisse jamais personne prendre possession de cette caravane. Le dragon rouge ne doit pas être trouvé. 

 

       Zoran blanchit directement. Le dragon rouge ? Ce mot, il le connaissait. Il représentait la drogue rouge du dragon. Merde ! Tout n’avait pas été détruit, alors ? 

 

— Donc ce dragon s’y trouve ? Où s’y trouvait ? 

 

       Nathan se redressa et eut un sourire froid. Zoran frissonna en le voyant. Non pas de peur, mais de bien autre chose. Ce garçon le perturbait bien trop. 

 

— Non, ces hommes ne le trouveront jamais. Pour la bonne raison que j’ai tout brûlé une nuit quand j’ai compris qu’elle ne reviendrait plus. J’ai parlé avec un des clochards. Il se nommait Birdy. Il était le plus âgé du groupe. C’est lui qui m’a appris à lire et à écrire. Cet homme était très cultivé. Il m’a raconté alors son histoire. Il avait été marié à une femme dont le passé était horrible. À cause d’une certaine drogue que l’on surnommait drogue du dragon rouge, elle avait commis un acte répréhensible. De cet acte, son père s’était suicidé et elle avait été internée. Elle avait eu un enfant. Des années plus tard, il tomba amoureux d’elle. Il voulait lui redonner une vie normale et heureuse. Après tout, ce n’était en rien sa faute. 

 

       Zoran essuya les larmes sur les joues du jeune homme. Celui-ci reprit d’une voix monotone :

 

— Le créateur et le vrai coupable ont fini par la retrouver et l’ont abattu comme un chien. Plus rien ne lui tenait à cœur alors il a tout quitté et il s’est noyé dans l’alcool. C’est triste. Il n’a jamais pu se remettre de cette perte. Alors, je lui ai parlé de ce dragon rouge et il m’a dit, brûle le ainsi plus personne ne mourra à cause de lui. Alors, j’ai récupéré tous les sachets et je les ai brûlés. Deux jours plus tard, il est mort. Il avait l’air en paix. Je me suis dit que j’avais eu raison, mais il y a eu un mort alors…

 

       Zoran porta ses deux mains sur les joues du garçon pour lui lever le visage vers lui.

 

– Non. Vous avez fait le bon choix. Cette merde devait disparaitre, Nathan. Elle a causé énormément de dégât. Alors certes, c’est très triste pour ce garçon, mais il s’est juste retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Tu n’es en rien responsable. Tu as sauvé des vies, Nathan. Bien plus que tu peux le croire. 

 

       Le regard troublé, Nathan ne savait plus quoi pensé ? Avait-il réellement agi comme il le fallait ? Il sentit alors des lèvres prendre possession des siennes. Il ne réagit pas sur le moment tellement surpris, avant de fermer les yeux et de répondre à l’étreinte. C’était tellement bon et agréable. Une chaleur envahissait ses joues. Quand Zoran redressa la tête, il déposa un tendre baiser sur le nez avant de se reculer. 

 

       Nathan sentait ses jambes flageolantes. Il porta une main à ses lèvres, troublées. Le bougre, il lui avait piqué son premier baiser. Pourquoi en était-il ravi ?

 

— Qu’est devenu le corps du garçon, Zoran ? 

 

— Nous l’avons rendu à sa famille. Elle le recherchait activement. Son père et lui s’étaient disputés pour une broutille. C’est stupide. Borghèse les a aidés à payer les frais de l’enterrement. Il s’en est voulu de n’être pas arrivé à temps. Il est débile parfois. Il ne peut pas sauver tout le monde. 

 

— Pas sûr qu’il apprécie que tu le traites de débile. Bah ! En même temps, tu travailles pour lui, je ne devrais pas être surpris. Après tout, les débiles ont tendance à se réunir. 

 

— Hé ! s’exclama Zoran, aussitôt. 

 

       Nathan avait retrouvé son attitude habituelle. Était-ce bien ou pas ? Zoran n’en savait rien, mais pour le moment, il ne pouvait rien faire d’autre. Il attrapa le casque et le fourgua dans les bras du garçon. 

 

— Allez, amène-toi ! Je t’emmène en balade. 

 

— Je te préviens, j’ai trop la flemme de marcher.

 

— Je vais te la faire bouffer ta flemmardise, grogna Zoran, en remettant son casque. 

 

       Nathan jeta un coup d’œil rapide vers la caravane. Il fit comme une prière pour l’âme perdue, puis remonta derrière l’homme. Il n’eut plus d’hésitation cette fois-ci, il entoura la taille de ses bras. Il n’avouera pas à quel point il se sentait vraiment en sécurité quand il était dans les bras de Zoran. Il ne pouvait pas encore se l’avouer. C’était encore trop tôt. 

 

— Et arrête de rouler comme un vieux. 

 

– P’tain. Nathan ? Par moment, tu mérites une bonne fessée. 

 

       Sans attendre de réponse, Zoran mit le moteur en marche et prit une direction inconnue, prenant de plus en plus de vitesse dès qu’il se retrouva sur une route peu fréquentée au grand plaisir de Nathan, affichant un sourire sur les lèvres. 

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Commentaires
S
Mhoooon mais ce chapitre est tellement chouuuu !!! :o Jian qui est au petit soin avec Michio, la scène avec notre chinois d'amour et son russe préféré, Mimi qui les dessine... Et là, cette fin avec Zozo et Nathan... Mais c'est juste teeeeellement mignon !!! >w< Bon, les circonstence de leur premier baiser n'est pas aussi romantique qu'avec Dae et Sven, mais l'ambiance était là quand même *-* Bon bah, plus qu'à Rolan et Léon de se bouger le train, hein !! xD<br /> <br /> Vivement la suiiiiite <3 <3
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